Markus appelle Christa chez elle, à Vienne. Il ne sait pas si elle est là, si elle va lui répondre. Il ne sait pas ce qu’elle fait en ce moment, à quoi elle pense, son humeur.
Souvent il tombe mal : elle est occupée, alors il lui faut du temps pour capter son attention, pour la mener dans la même disposition que lui. Parfois elle est pressée, elle attend quelqu’un, alors c’est mauvais, c’est comme une menace. Il vaut encore mieux que le quelqu’un soit là, alors une connivence est possible. Elle répond par un mot : « Oui, non, c’est ça, d’accord… » et Markus lui parle longuement, il lui pose des questions. Il ou elle ? Ami ou amant ? … et Christa répond.
Markus n’est jamais allé à Vienne. Il a rencontré Christa en Italie.
– « Ja. » … Elle est chez elle.
– « Christa ? » … Un temps. Pour qu’elle s’interroge, qu’elle cherche dans sa mémoire. Quelle est cette voix ? « Markus. » Au ton de la réponse, il saura si elle veut bien de lui.
– « Markus, comment ça va ? Je suis contente de t’entendre. Il y a longtemps. » … Est-ce un reproche ? Est-il malvenu ?
– « Il y a longtemps que je pense à toi. Raconte-moi. »
– « Je prépare le dîner pour un couple d’amis. C’est la course. » … C’est mauvais. Des gens qu’il ne connaît pas occupent ses pensées. Elle n’est pas à lui.
– « Je rappellerai. »
– « Non, non, parle-moi. Je dois aller les chercher, j’ai un peu de temps. »
– « Sûr ? »
– « Oui, parle-moi, s’il te plaît. » Son accent autrichien.
– « Quand devras-tu partir ? » … il veut savoir le temps dont il dispose.
– « Pas avant une demi-heure. Mais je dois préparer une salade. »
– « Alors nous avons un quart d’heure. » Son accent crvat.
– « Ce n’est pas beaucoup. » …Regrette-t-elle d’avoir dit oui ?
– « C’est assez. »
– « Je ne sais pas. » … Elle minaude. On n’a pas le temps.
– » Christa, est-ce que tu peux être à moi un quart d’heure ? »
– « Markus, c’est si court. » … Elle hésite.
– « Alors je rappellerai un autre jour. »
– « Non, attends. »
– « Ton coeur, il bat fort ? »
– « Oui il bat fort. Toujours quand tu me téléphones, tu sais bien. »
– « Je veux le sentir battre. Mets ta main sur ton coeur… Tu l’as fait ? »
– « Oui. »
– « Ta main, c’est la mienne, tu sais bien. »
– « Je sais, ma main, c’est ta main. Je sens battre mon coeur. »
– « Je veux toucher ta peau. Pose ta main sur ta peau. »
– « J’ai un pull. »
– « Passe dessous. »
– « Oui. J’ai les mains froides. »
– « Je sais. Dis-moi où est ta main. »
– « Elle est posée sur ma poitrine. Je sens mon coeur qui bat. »
– « Dis-moi exactement où est ta main. »
– « Elle est en dessous de mon sein, sur mon coeur. » … Sa respiration a changé. Sa voix aussi. Plus grave.
– « Christa ? »
– « Oui… »
– « Tu es nue sous ton pull ? »
– « Je porte un soutien-gorge. »
– « On s’en fout, d’accord ? »
– « D’accord. Markus, j’aime ta voix. » … Ils sont ensemble. La salade attendra.
– « Où es-tu ? »
– « Dans le fauteuil. »
– « Jambes croisées ? »
– « Oui. »
– « Je veux t’embrasser. Ferme les yeux. Garde ta main sur ton coeur. »
– « Oui. »
– « Ouvre la bouche, doucement… Tu l’as fait ? »
– « Oui. »
– « Christa ? » … Il parle tout bas.
– « Oui ? »
– « Passe ta langue entre tes dents, très doucement… Christa, tu le fais ? »
– « Oui. »
– « Dis mon nom. »
– « Markus, Markus, Markus… »
– « Christa, passe ta langue sur tes lèvres. Ouvre la bouche. Encore. Donne ta langue. Ferme les yeux. Christa ? »
– « Markus, Markus… »
– « Dis-moi. »
– « Je veux que tu me caresses, je veux être avec toi. »
– « Je suis là Christa, je te caresse. Où veux-tu ? »
– « Toi, décide. » … Il l’entend à peine.
– « Ton sexe, caresse ton sexe. » … Markus ferme les yeux. Sa main presse son sexe tendu, à travers le pantalon.
– « Markus, et toi ? »
– « Moi aussi. Je bande. Je me branle Christa. Christa ? » … Christa murmure : je t’aime. « Je veux te baiser maintenant, tu veux ? »
– « Oui, je veux. »
– « Parle-moi. »
– « J’ai des collants. »
– « Tu veux bien les ôter ? »
– « Je me caresse, Markus. » … Sa voix tremble.
– « Ote-les, s’il te plaît. » … Un temps. Elle pose le téléphone.
– « Parle-moi, Markus. »
– « Non, toi parle. »
– « J’ai envie de toi, Markus. »
– « Je suis là, ouvre-toi… Tu es pieds nus ? »
– « Oui. »
– « Pose les pieds sur le fauteuil… Tu l’as fait ? »
– « Et toi, et toi, dis-moi. »
– « Je me branle, je me branle pour toi. Je bande pour toi. Tu me vois ? … J’ai ma queue dans ma main. Elle est à toi, Christa. Tu la vois ? »
– « S’il te plaît, parle encore. »
– « Dis-moi comment tu es, caresse-toi et parle-moi. »
– « Je suis assise dans le fauteuil. J’ai les jambes relevées. Les pieds sur le fauteuil. »
– « Les pieds nus ? »
– « Oui, les pieds nus. »
– « Ecarte-les… Dis-moi où est ta main. »
– « Sur moi. »
– « Dis-moi ce qu’elle fait. Dis-moi exactement. »
– « Elle caresse. »
– « Comment ? »
– « De haut en bas… Dis-moi ce que tu veux. »
– « Je veux que tu ouvres plus fort les cuisses. Je veux entrer dans ton sexe, je veux le sentir s’ouvrir pour moi. Je veux qu’il me prenne. Pénètre dedans, Christa. Entre ta main dans ton sexe. Jusqu’au fond. Christa, est-ce que tu es mouillée ? »
– « Parle-moi… Je te sens, Markus. »
– « Entre, entre, je vais jouir, Christa. Dis-moi… »
Leurs voix tremblantes. Leurs voix qui se font l’amour. Seulement tenus par leurs voix qui se caressent. Seulement leurs voix. Elle gémit.
Et elle dit les mots. Elle dit les mots pour lui.
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